samedi, avril 21, 2007

Vive un monde enfin graphique qui assujettisse le réel toujours après l'irréel, là où l'on pourra le réprimer

On appelle ça campagne, cette publicité. Marketing, vendre, seules images, discours et autres imaginaires à plat. Dans publicité il y a public. Du vent à plat qui décore notre environnement, et nous fait être ensemble. C'est ça, être ensemble, pour tous ces braves gens de la publicité, du marketing, du journalisme, du graphisme : se tenir ensemble des "espaces" (tout un concept, ça, qui se fait passer pour plus ancien que tout ancien, une sorte de principe premier métaphysique, tu parles), entourés par des images sur les murs de la grotte, images tellement plates qu'au contraire des vrais grottes, on ne voit pas la main qui les a tracé. Les sondages, c'est du "marketing d'opinion". Et tout cela est virtuel d'une autre manière encore : permet d'anticiper ce qui va arriver (et si, en 2002, ils le savaient, figurez-vous, mais deux jours avant, peu importe à la limite : à ne savoir que ce dont on a peur, comment voulez-vous qu'autre chose arrive ?). Tout plein de gens qui vont blablater sur les sondages pendant des plombes et puis, la bouche en coeur, qui seraient capables de dire comme s'ils réfléchissaient : "ah mais Orwell il avait déjà tout vu, et puis Huxley aussi, ah les écrivains de science-fiction, tout de même, ils sont forts..." ; bientôt ils ne vont plus lire que ça, pour être au courant avant tout le monde de ce qui va arriver ; bientôt ils vont s'opposer aux délinquants en mettant bien en évidence leurs cadenas, leurs richesses, leur retrait du monde commun, leur mépris à l'égard de celui-ci, leurs complicités avec d'autres affligeants winners, saupoudrant leur petite vie d'une petite peur, pour qu'au moment où ça arrive ils puissent dire : "voyez, je vous l'avais dit, alors maintenant comme j'ai la primauté de la prévision, foutez-moi cette racaille en taule, et appelez tsahal pour nettoyer sa famille au K3B (Kärcher-Bien-Beau-Bosch)". C'est ça, le virtuel, pour eux, et même pour leurs contestataires, sans rechigner : le plus sûr moyen que ce qui a été prévu arrive (ou, comme dirait les googleiens : "dit- moi ce que tu cherches, je te dirai à quoi tu penses") ; pas le tourbillon herméneutique, la boucle performative ; à l'origine, on appelait ça la théorie des systèmes (et oui, un truc informationnel, seauchiots-lavette de la communication). A l'heure où la plupart des gens confondent Les Choses avec de la socio, et le "marketing d'opinion" en premier lieu bien sûr, à l'heure où le graphisme se fait passer pour l'art (rendez-vous compte, tout de même, ils dessinent les uniformes de la police, si c'est pas une amrque de prestige, ça -- bientôt ils vont nous "dessiner" les cages où l'on nous fait habiter, là on pourra enfin pleurer la mort de Le Corbusier, et très très fort en plus), et le théâtre dyonisien médiatique, comme dirait Durand, mais sous quelle poigne d'Apollon, pour le réel, et son spectacle dénommé pour politique pour politique ; à cette heure là, je bois un deuxième café, allume une troisième clope ; dehors il fait beau, c'est bien ; à vivre dans l'irréel, c'est après qu'on s'aperçoit qu'en fait, c'était réel ; mais on ne se dit jamais que c'est réel, n'est-ce pas : trop dangereux.


statistique Locations of visitors to this page