jeudi, novembre 23, 2006

Honte

Lorsque l’on fait, dit, quelque chose qui ne ressemble pas, n’obéit pas, aux lieux communs qui nous entourent, aux habitudes de reconnaissance de ceux qui nous entourent, lorsque quelque chose s’échappe, que l’on fait appel à quelque chose qui se trouve en dehors du cercle ou au contraire bien trop enfoui en lui, pas simplement à la surface, lorsque l’on rompt l’harmonie des tranquilles représentations, de la tranquille représentation collective cerclée, par exemple pour tenter de dire vraiment les choses, comme la mémoire à un ami lors d’une cérémonie rappelant son souvenir, le seul sentiment que l’on a, très différent du moment où l’on a produit notre texte, ce que nous allons dire, ou faire, est un sentiment de honte, une incommensurable honte sauf à recevoir la limite, la sanction, du groupe auquel notre action est destinée, du génie à la plus atterrante stupidité. Voilà aussi pourquoi s’il faut être seul pour produire quelque chose de non-conformiste, quelque chose qui tente d’être vrai, celui qui l’est trop longtemps en viendra à épouser les lieux communs, la conformité, d’une communauté fantasmée, ou tout simplement de celle qui l’entoure, ou de celle qu’il a plus jeune, à commencer par la famille. C’est aussi pourquoi les risques pris ne sont qu’à la mesure de ce que peuvent recevoir les membres de la communauté à laquelle nous appartenons, et nous gardons par-devers nous-mêmes ce que nous pensons qu’ils ne puissent pas recevoir, sans forcément être juste dans ce jugement, jusqu’à ce que, n’imaginant plus les chances de le sortir de sa cachette, nous abandonnons tout à fait ces essais ainsi que ce qui, en nous, comme sentiment, comme tension existentielle, comme devenir, supportait sa création, et c’est ainsi que nous nous fondons dans le décor qui nous entoure.


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